Episode Transcript
[00:00:00] Le balado que tu t'apprêtes à écouter, tu peux pas l'entendre ailleurs. C'est une exclusivité.
[00:00:15] Merci de rester avec nous sur CFA 88.3. Vous êtes toujours à l'écoute de votre émission hebdomadaire, l'économie au mouvement. Et aujourd'hui, on attaque un sujet qui fait beaucoup parler, c'est la transition écologique. Ce qu'on nous promet vert, durable, responsable, mais au fond, est-elle aussi juste ? Imaginez, vous vivez en région.
[00:00:40] Vous devez parcourir 40 km par jour pour aller travailler. Vous chauffez au mazout, vous avez trois enfants, et là, vous entendez... Il faut l'électricité et le transport. Il faut remplacer vos fenêtres. Il faut passer à la voiture électrique. Mais là, oh... Comment... Mais comment ? Qu'on a déjà du mal à finir le mois ?
[00:01:06] qu'on n'ait ni bornes de recharge à proximité, ni fonds pour une rénovation. C'est vrai. La vraie question qui gagne dans la transition écologique et surtout qui risque d'en être exclue. Prenons un exemple concret, la taxe carbone. En théorie, c'est un bon principe car On taxe les comportements polluants pour encourager les alternatives propres. Et c'est logique, non? Oui. Mais dans la pratique, c'est une autre histoire. Un ménage aisé peut absorber en hausse de 15 ou 20 dollars par mois sur sa facture d'essence ou de chauffage. Il peut même acheter un véhicule électrique ou installer un thermopompe. Mais un ménage à faible revenu, il n'a pas toujours le choix.
[00:02:00] Il vit souvent loin des grands centres, il dépend de sa voiture et son logement est peut-être mal isolé. Même si le gouvernement fédéral a suspendu temporairement la taxe carbone sur l'essence en 2025, les inégalités demeurent. Selon le réseau canadien de lutte à la pauvreté énergétique, les 20% les plus pauvres consacrent près de 10% de leurs revenus à l'énergie. C'est plus du triple que les ménages les plus riches. Donc, est-ce qu'on parle du taxe vert ?
[00:02:36] ou d'un impôt, je peux le dire, déguisé, qui pèse surtout sur les plus fragiles. Les subventions aux véhicules électriques pour qui, au juste ? Autre exemple, les subventions d'achat des voitures électriques. Sur le papier, ça semble génial, merveilleux. On vous donne une aide financière pour changer votre véhicule, réduire vos émissions, moderniser votre mobilité, mais en réalité, Ce sont surtout les plus riches qui en profitent. Mais pourquoi ? Parce que même avec 5 000 ou 7 000 dollars de rabais, les véhicules électriques coûtent encore 40 000, 50 000, voire plus même. Et ce n'est pas tout. Il faut avoir un garage. Il faut pouvoir installer une borne. Il faut souvent habiter en zone urbaine. En 2024, Ottawa a plafonné les subventions aux véhicules de 55 000, mais la plupart des modèles populaires dépassent déjà ce seuil. Et depuis le printemps 2025, le gouvernement a annoncé la fin graduelle de ce subvention d'ici 2026. Résultat, un double effet pervers. Ceux qui ont déjà les moyens bénéficient d'un coup de pouce, et ceux qui n'ont pas les moyens continuent de rouler dans des vieux véhicules souvent plus polluants. Une transition à deux vitesses. Car Entre emplois verts, pertes brunes, c'est un dilemme silencieux. On entend souvent la transition verte va créer des milliers d'emplois. Et c'est vrai, car on parle de la rénovation éconergétique, de production d'énergie renouvelable, de transport collectif. Ce sont des secteurs en plein croissance. Mais ce qu'on dit moins, c'est que chaque emploi vert créé est parfois accompagné d'un emploi perdu, dont les hydrocarbures, Dans les fabrications de moteurs thermiques, dans les raffineries, dans le transport routier, l'endurance. Prenons l'exemple d'Alberta. Parce que j'aime bien moi cet exemple car des milliers de travailleurs du secteur pétrolier vivent une grande incertitude. Certains ne reconvertissent, d'autres abandonnent et certains quittent même la province. Et le gouvernement fédéral a bien mis en place un fonds pour une transition juste, doté de 2 milliards de dollars, mais selon le bureau du directeur parlementaire du budget, on a moins de 15% de ce fonds était ou bien avait été utilisé à la fin de 2024. Et pourquoi ? Trop de paperasses, trop de lenteurs, pas assez ciblés. Et pendant ce temps, les travailleurs attendent, inquiets, ils sont en colère parfois même. Et parce qu'une transition, si elle est seulement technique, elle échoue.
[00:05:23] Tout n'est pas perdu. Des solutions concrètes plus équitables existent déjà. Car prenez l'exemple de la Colombie-Britannique. Un projet pilote a été testé sur la tarification progressive du carbone. Et comme résultat, les ménages à faible revenu ont reçu un remboursement supérieur aux coûts réels de la taxe, réduisant leur vulnérabilité énergétique. À Montréal, plusieurs arrondissements ont lancé des budgets participatifs climatiques. Des citoyens décident ensemble où investir leurs fonds locaux. Trois Verts, Jardins collectifs, stations de vélos partagées. Ce n'est pas spectaculaire, mais c'est local, inclusif, engageant. Et puis, il y a l'idée de servir, ou bien de services verts universels.
[00:06:08] transport en commun gratuit pour les étudiants, les aînés, les personnes à faible revenu tel que le cas de Sherbrooke par exemple, l'UDS, aide à la rénovation thermique pour les logements sociaux, programme public de formation au métier vert. L'écologie ne doit pas être un privilège, elle doit devenir un droit commun, un levier de solidarité. Alors oui, la transition verte est nécessaire, mais Si elle est perçue comme une contrainte, une punition, un effort imposé par le haut, elle échouera. Elle creusera encore plus les écarts, elle nourrira les méfiances.
[00:06:47] et elle risquera de basculer dans ce qu'on appelle le populisme anti-écolo. Lutte contre les changements climatiques, c'est urgent, mais le faire sans justice sociale, c'est dangereux et ne construit pas un futur durable sur une société fracturée. Et si on imaginait une transition juste? Alors, posons-nous cette question.
[00:07:13] À quoi ressemblerait une vraie transition équitable en 2030 ? Imaginez. Un Québec à chaque maison un bien isolé, où les familles n'ont pas à choisir entre se chauffer ou se nourrir, où les transports en commun sont accessibles gratuits pour les plus vulnérables, où chaque travailleur de l'industrie fossile a une porte ouverte vers un métier vert qualifié reconnu. Et c'est possible, mais ce n'est pas automatique. Il faut des choix politiques forts, inclure les territoires et surtout écouter ceux qu'on oublie trop souvent dans les grandes conférences. Alors voilà, l'économie verte est plus qu'un ensemble de technologies, c'est un projet stratégique de société.
[00:08:01] Et quant au projet, il peut être exclusif ou inclusif. La vraie question, au fond, c'est celle-là. Souhaitons sauver le climat ou le climat social. Et si la bonne réponse, c'était les deux ensemble, en même temps?
[00:08:18] Mais avant de passer au prochain sujet, j'aimerais qu'on prenne encore quelques minutes pour aller un peu plus loin, parce qu'on a parlé de revenus, logement, transport, reconversion, mais il y a d'autres dimensions fondamentales à cette transition juste qu'on oublie trop souvent. D'abord, la question intergénérationnelle. On parle souvent de l'avenir de nos enfants dans des discours politiques, mais soyons honnêtes aujourd'hui, est-ce que les jeunes générations qui payent déjà une partie de la facture, elles payent en instabilité économique, en anxiété climatique, en accès difficile au logement. Et souvent, elles n'ont ni le pouvoir politique ni les ressources économiques pour participer pleinement aux choix de la société qu'on est en train de faire. Donc, Dernier mot, la transition ne sera juste que si elle est partagée. Alors, que retenir de tout cela? La transition verte ne doit pas se limiter à un projet imposé d'en haut, ni un luxe réservé aux métropoles, ni une vitrine technologique déconnectée du réel. Elle doit devenir un projet collectif, par nous tous, pensé à partir des vulnérabilités, mais pas seulement des objectifs, parce que Qui est en jeu ? Ce n'est pas seulement le climat, c'est le contrat social, celui qui nous lie, celui qui dit que personne ne sera laissé de côté. Et là, on se retrouve dans le vrai sens de l'économie, organiser la maison commune, avec justice, avec solidarité, avec un bon espoir. Vous êtes toujours à l'écoute de l'Economie au Mouvement sur CFA 88.3 FM. On prend une toute dernière pause et ensuite on ouvre notre dernier chapitre de la journée qui portera sur l'intelligence artificielle et l'emploi. Faut-il avoir peur ou s'adapter ? Donc à tout de suite sur CFA 88.3.
